Parcours de Carrières (Career Paths) : du Career Crafting pour nos consultant·es
Besoins & pièges
Les frameworks de gestion de carrière constituent un sujet épineux dans les entreprises informatiques. Mais il est même périlleux dans le cadre d’une entreprise de conseil IT !
La plupart des modèles existants tournent autour du concept des échelles de carrière, que l’on grimpe en acceptant toujours plus de responsabilités.
On peut commencer au niveau 1, en tant qu’Ingénieur Junior par exemple, avant de grandir au niveau 2, 3 puis 4 soit en tant que Lead ou Spécialiste Technique.
Cependant, les modèles en échelle ne sont pas toujours bien accueillis dans l’informatique, étant donné que les possibilités de promotion hiérarchique sont souvent limitées à 2 chemins globaux distincts : l’expertise et le management, bien qu’ils soient eux-mêmes divisés en sous-chemins (ex : Ingénieur Data, Manager de Programmes Techniques, etc). De plus, afin de monter au niveau suivant, la plupart des employés doivent acquérir des “aptitudes d’entreprise” d’un domaine de compétence souvent bien éloigné des leurs, et sur lesquels ils travaillent à contrecœur.
En réponse au manque d’adéquation et à l’insatisfaction naissante, certaines entreprises ont tenté de se débarrasser complètement du concept de parcours de carrière. Leurs structures organisationnelles (semi-)horizontales reposent sur le partage et le sens des responsabilités de chaque collaborateur. Seulement, cette structure a un prix : lorsque tout le monde a le même “titre”, gérer les attentes de ses pairs est un exercice compliqué et parfois chronophage.
Par conséquent, cela peut avoir un impact sur :
- La fluidité des interactions sociales
- Lorsqu’une entreprise grandit, et que connaître tout le monde devient difficile, nous pouvons souvent être frustrés que certains collègues soient capables de s’occuper de tâches critiques du premier coup alors que d’autres ayant le même titre ne savent parfois pas par où commencer.
- L’équité des évaluations de performance
- Des attentes différentes pour des personnes ayant exactement les mêmes responsabilités (sur le papier) est difficile à justifier et appliquer.
- La construction proactive de carrière
- Les opportunités de croissance au sein de l’entreprise peuvent être diluées par les petites tâches quotidiennes qui peuvent ou non faciliter la prise de nouvelles responsabilités.
Du point de vue d’un manager, cela ne semble pas idéal.
Mais avant de revenir à des concepts de carrières fondés sur une “hiérarchie”, nous devrions d’abord nous attarder sur un autre point clé : construire une carrière ne veut pas nécessairement dire enchaîner les changements de titre.
En d’autres termes, les promotions de poste ne contribuent pas forcément à ce que l’on cherche dans notre travail et, plus largement, dans notre vie.
Au sein du même rôle, les collaborateurs d’une entreprise peuvent avoir des impacts très différents qui, agrégés ou orchestrés, peuvent fournir des résultats décuplés. Et, au lieu d’essayer de définir des “profils” ou des “postes” pour étiqueter des personnes (souvent afin de répondre à des problématiques de gestion des attentes et d’optimisation de l’exécution de stratégies top-down), les entreprises peuvent au contraire embrasser et se focaliser sur la diversité des motivations et compétences de leurs employés.
De plus, si on se réfère à une étude du cabinet McKinsey, la recherche du sens du travail par les employés n’a jamais été aussi importante. Il est donc de plus en plus évident que les parcours de carrière aux échelles prédéfinies ont atteint leur fin de vie, ne pouvant plus manager et retenir les employés puisque toujours en décalage plus ou moins élevé avec leurs objectifs personnels.
Mais comment pouvons-nous gérer des carrières sans parcours prédéfinis ? Est-il vraiment possible d’aligner des aspirations individuelles avec des objectifs d’entreprise ?
En un mot : oui. Du moins, c’est ce que nous cherchons à atteindre à Zenika avec notre framework de chemins de carrières (Career Paths Framework), utilisé lors de nos séances internes de coaching professionnel.
Notre framework & nos sessions de coaching
Comme notre framework de support est disponible en projet open source, vous pouvez trouver sa description complète et détaillée sur le dépôt Github disponible ici.
Au lieu de le décrire une fois de plus dans cet article, nous allons plutôt nous attarder sur les principes de coaching et comment l’utilisation d’un framework nous a aidé dans ce domaine.
En premier lieu, un projet de carrière est un projet individuel. Dans une organisation horizontale, il n’y a pas de “chemin direct vers le sommet” et un projet de carrière ressemble rarement à un autre !
Mais lorsque la hiérarchie n’est plus un modèle de référence, on ne planifie plus pour viser des titres et des postes. On se focalise dorénavant sur le développement de son impact sur des axes stratégiques.
À Zenika, nous avons identifié une première version des capacités stratégiques qui nous permettent de soutenir et maintenir nos offres globales :
- Delivery – capacité à définir et exécuter des processus dans l’optique de produire des résultats
- Leadership – capacité à fédérer des équipes pour les faire atterrir sur des cibles prédéfinies
- Posture – capacité à influencer positivement son entourage
- Architecture – capacité à travailler sur la transformation et le développement durable de systèmes
- Business – capacité à répondre aux besoins d’autrui
- Pratiques et Domaines associés – capacité à tirer parti de ses expertises et de sa culture générale pour résoudre des problèmes
Une session de coaching se servant de ce framework comme base de travail se déroule souvent en clarifiant, pour chaque consultant⸱e :
- Leurs expériences marquantes et les plus récentes
- Leur impact actuel sur chaque sujet
- Leurs facteurs de motivation et leur ambition
- Leurs désirs et priorités à venir
À partir de là, nous pouvons co-définir des actions tactiques (ex : opportunités de missions, mise en relation humaine, etc) ou des axes de développement stratégiques (ex : prendre le lead sur un sujet innovant, changer de focus pour l’impact visé, etc).
L’idée principale est de faire en sorte que chaque consultant⸱e s’approprie sa carrière et la façonne de la meilleure façon possible en l’alignant sur sa recherche de sens, son bien-être et ses facteurs de motivation.
De plus, les temps dédiés à la gestion de carrière doivent rester séparés des revues de performance. Construire une carrière, c’est se tourner vers l’avenir ; évaluer une performance, c’est faire le bilan du passé. Nous devons donc faire attention à ne pas mélanger les deux.
Bien sûr, être performant sur certains sujets donne davantage d’opportunités de développement. Mais cela ne doit jamais rester l’unique point de référence pour une construction de carrière. Autrement, on risque de passer à côté d’autres éléments aussi importants comme les facteurs de motivation, les aspirations individuelles et les capacités de résilience.
Un plan de carrière réussi est parfaitement compatible avec des performances variables. Il est difficile de donner toujours le meilleur de soi-même sur le long terme. Et ce n’est pas un problème tant que l’on atteint son but.
Aller plus loin
Pour les postes les plus élevés dans une hiérarchie donnée, les compétences de base demandées sont souvent similaires : un mix de leadership, de capacité à produire des résultats et de qualités d’analyse. La séparation des profils se fait davantage au niveau du focus dans les domaines d’expertise. Par exemple, pour un parcours “tech”, on pourra trouver des branches se focalisant sur l’ingénierie, le produit, le management…
Cela signifie qu’il existe des ponts entre le concept de career crafting et les modèles plus restrictifs des échelles de carrière.
Faire grandir son impact via des capacités liées au delivery, au leadership, à la posture, à l’architecture (design/transformation) et au business prend du temps mais permet la construction de fondations solides pour des “postes plus élevés”.
Se focaliser sur des domaines d’expertise n’aidera qu’à la sélection de “branches” de l’échelle, afin de grandir sur un axe prédéfini.
Cependant, même si on peut voir une corrélation entre les deux approches, on peut rapidement saisir le potentiel limitant de l’approche bidimensionnelle des échelles de carrière.
Dans la recherche de nouveaux rôles et/ou responsabilités, nous espérons que notre framework et notre approche peuvent ouvrir davantage de perspectives, en appréciant au mieux le potentiel de chaque individu.
Autres articles liés au sujet :
- About Peter Drucker’s “Managing Oneself”: https://qaspire.com/2020/10/04/leading-the-self-in-tough-times-drucker-revisited/
- CareerPath at Gitlab: https://about.gitlab.com/handbook/engineering/career-development/
- SquareUp approach: https://developer.squareup.com/blog/squares-growth-framework-for-engineers-and-engineering-managers/
- Emmanuel Goossaert: https://codecapsule.com/2021/06/15/career-growth-what-paths-after-senior-engineer/
- Dropbox approach: https://dropbox.tech/infrastructure/sharing-our-engineering-career-framework-with-the-world