Estimation de notre empreinte environnementale
Comme toutes les activités humaines, le travail au sein d’une société comme Zenika a nécessairement un impact environnemental non négligeable.
Contrairement à certaines idées reçues, “numérique” ne rime pas forcément avec “écologique”.
Vous vous êtes peut-être déjà posé la question : vaut-il mieux imprimer un document ou le consulter en ligne? Aller au bureau ou télé-travailler ?
Pour nous qui concevons et déployons des services numériques, il devient essentiel d’être sensibilisés et responsabilisés sur ces sujets alors que les défis environnementaux s’accumulent. Car le numérique occupe une part grandissante dans les émissions de gaz à effet de serre (GES) causant le dérèglement climatique : de 4% actuellement, elle pourrait doubler d’ici à 2025.
Afin d’en savoir plus sur notre impact en tant que société du numérique, nous avons ainsi travaillé ces dernières semaines sur la mesure de notre empreinte écologique.
Qu’est-ce qu’un bilan carbone
Un bilan carbone, c’est une sorte d’audit annuel qui comptabilise les émissions de gaz à effet de serre liées directement ou indirectement à l’activité d’une entreprise. Pour l’établir, l’Agence de l’Environnement Et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) met à disposition un ensemble de données centralisées, établies de manière collaborative : les facteurs d’émissions.
Voici l’exemple d’un de ces facteurs pour une chaise de bureau en bois :
Cette fiche vous permet de visualiser le total des émissions liées aux différentes étapes de la production de la chaise, de l’extraction des matières premières à sa distribution. Au total, on obtient 18,6 kg eq C02.
En observant l’activité de l’organisation d’année en année, on peut ainsi obtenir :
- sa contribution au réchauffement climatique
- une priorisation des actions de réduction à entamer
- l’évolution des résultats de ces actions
- des sources d’inspiration sur les possibilités de compensation
Depuis la loi Grenelle II de 2012, les entreprises françaises de plus 500 salariés doivent publier tous les quatre ans leur bilan carbone sur le site de l’ADEME. Dans les faits, l’amende de 1500 euros pour manquement à cette obligation n’est pas particulièrement incitative. Le caractère déclaratif du bilan n’entraîne d’ailleurs aucun contrôle.
Focus : Pour additionner et comparer facilement les émissions des différents gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane, protoxyde d’azote, etc.), on divise la masse d’un gaz par un facteur qui le caractérise : le potentiel de réchauffement global (PRG). On obtient ainsi une valeur dont l’unité est le “kilo équivalent C02”, qui correspond à la masse de dioxyde de carbone qui provoquerait le même réchauffement (le PRG du CO2 vaut 1). Pour mieux vous représenter les choses, sachez qu’un kilogramme de C02 a un volume proche d’un demi mètre-cube à pression et température standard. De plus, ce gaz reste présent à peu près 100 ans dans l’atmosphère. |
Comment avons-nous procédé ?
Le hasard nous a fait rencontrer en début d’année la société EcoTree, qui propose aux organisations comme aux particuliers de créer des puits de carbone en investissant dans la gestion durable de forêts françaises. Ces discussions nous ont éveillés sur la nécessité de mesurer rapidement notre impact, au-delà de la somme des “éco-gestes” que nous nous efforçons de pratiquer dans la mesure du possible.
La méthodologie officielle est là. Pas simple !
Que l’on souhaite monter en compétence ou qu’on fasse appel à une société spécialisée, cela va prendre du temps et de l’argent. Compte tenu du contexte lié à cette année 2020, dégager rapidement un budget imprévu n’est pas envisageable, ce qui est bien compréhensible.
Nous allons donc devoir nous débrouiller autrement ! L’agiliste en moi se demande si on peut faire plus incrémental pour avoir un premier retour.
Personnellement, j’aime bien utiliser le Split Poker en phase de grooming pour travailler avec des User Stories plus petites. Je vous invite à prendre connaissance de l’infographie originale si le sujet vous intéresse.
J’ai ainsi utilisé les 2 cartes suivantes :
- “Variations de données” : nous allons faire l’étude sur une seule agence, la mienne, sur une période limitée : de janvier à août 2020
- “Effort principal” : nous n’allons pas chercher la précision de la donnée. De toute façon, nous ne sommes pas vraiment sur une année représentative !
En cas d’échec, nous n’aurons pas remué ciel et terre pendant 6 mois ! Je définis ça comme une “perte acceptable”.
Peut-être peut-on déjà obtenir un résultat très approximatif, mais rapidement, dans un premier temps pour avoir une idée des ordres de grandeur, et dans un second temps chercher à l’améliorer tout en passant à l’action ?
Choix de GoodPlanet
Au cours d’une conversation dans mon magasin de produits bios préféré, je discute avec une ancienne cliente de Digitaleo qui me parle du fait qu’ils ont désormais un groupe de travail RSE et qu’ils se font accompagner par GoodPlanet, la fondation de Yann Arthus-Bertrand. Sur le le site, je découvre l’existence d’un calculateur en ligne comprenant plusieurs dizaines de questions qui semblent à notre portée. J’ouvre donc une feuille de calcul et note les questions, et me demande comment je vais pouvoir obtenir les informations.
Les intérêts évidents que je vois à ce calculateur :
- pour chaque élément, il existe 2 modes de réponse :
- on demande soit une valeur permettant de calculer directement une émission de GES (ex : consommation d’énergie des bureaux)
- ou une autre grandeur plus facile à obtenir (ex : surface des bureaux).
Pratique quand on souhaite aller au plus court !
- le résultat se met à jour à chaque fois que l’on renseigne une valeur (pas de “un conseiller vous contactera…”)
Ce qui serait intéressant de mon point de vue :
- mettre le code de l’algorithme en open-source (la méthode du calcul à destination des particuliers est néanmoins disponible)
- connaître les marges d’erreurs
- expliquer pourquoi certains éléments sont absents (ex : utilisation de services numérique en ligne)
- que le site GoodPlanet soit un peu plus sobre : la page d’accueil obtient un score de “D” à l’EcoIndex
A la pêche
Je prends donc mon bâton de pèlerin et vais chercher les informations dans les services concernés : DSI, Compta, RH.
Je crée des formulaires pour récupérer des infos auprès de mes collègues sur leurs habitudes de transport domicile / travail. On passe également une journée avec ma collègue Justine à éplucher les factures de l’agence de Rennes.
J’essaye d’obtenir les chiffres exacts quand j’ai le sentiment que c’est une donnée essentielle. Il arrive dans certains cas que l’information ne soit pas simple à obtenir rapidement, heureusement nous avons également des bonnes surprises grâce à la bonne volonté de mes collègues.
Au bout d’une bonne dizaine d’heures réparties sur quelques semaines, le résultat arrive !
Résultat
L’agence de Rennes compte 42 salariés.
Le bilan est le suivant:
Vos émissions s'élèvent à environ 66,39 tonnes équivalent CO2 |
Questionner le résultat
La répartition est nette, cela nous donnera des idées pour la suite. Néanmoins, la valeur en tant que telle ne nous parle pas plus que ça, on va donc essayer de la challenger de plusieurs manières.
Avec un autre calculateur
Avec le calculateur du site Reforest’Action, plus simple, on obtient le résultat suivant :
33,32 tonnes eq. CO2 |
Certes c’est 2 fois moins, mais l’ordre de grandeur est confirmé.
En comparant avec les bilans déclarés
On peut utiliser les bilans d’autres entreprises en partant du site de l’ADEME pour se faire une idée du réalisme du résultat. Pour pouvoir comparer ce qui est comparable, on peut même rapporter les émissions déclarées au nombre de salariés.
On obtient le résultat suivant pour des entreprises de service :
Nom | Effectif | Bilan ( t eq.CO2 ) | Bilan par salarié ( t eq.CO2 ) |
B… | 3226 | 3000 | 0,93 |
T… | 640 | 3000 | 4,688 |
G… | 1673 | 5777 | 3,453 |
E… | 10812 | 7379 | 0,682 |
S… | 5777 | 30014 | 5,195 |
Carbone 4 | 25 | 75 | 3 |
Zenika Rennes | 42 | 66 | 1,571 |
Carbone 4 est le cabinet de conseil de Jean-Marc Jancovici, qui est notamment le créateur du concept de bilan carbone, on peut donc apporter à leur déclaration une certaine confiance.
Au final, on obtient un résultat sur GoodPlanet qui à défaut d’être exact, semble suffisamment plausible pour qu’on puisse commencer à travailler avec.
Au delà du résultat
Peut-on généraliser cette expérience ?
Nous avons traité ce calcul comme une expérimentation sans trop savoir où elle allait nous mener, et en essayant de garder une certaine distance par rapport au résultat en valeur absolue tout en restant humbles sur les conclusions que l’on pourrait en tirer.
A priori nous ne pouvons pas la généraliser à l’ensemble de l’entreprise, mais elle nous donne des éléments pour commencer à travailler.
Nous allons tout de même proposer aux autres agences de la répéter à l’identique si elles le souhaitent, ce qui leur évitera de passer du temps sur des formules. Cela nous permettra d’une part de confronter nos propres calculs, d’autre part d’observer s’il y a des différences fondamentales d’une agence à l’autre.
Avons-nous confiance ?
En observant les bilans d’autres sociétés, on obtient un bilan par salarié qui évolue entre 0,5 et 5. Notre agence est dans cet intervalle, on peut donc accorder au résultat une certaine crédibilité, à défaut d’être exact. Peut-être est-il optimiste ? Nous ne le saurons qu’en effectuant ultérieurement un bilan carbone en bonne et due forme.
À l’action ?
Compte tenu de l’écart avec le second, le premier poste lié aux immobilisations resterait sans doute le plus important en généralisant à l’entreprise. Cela nous permet donc de concentrer nos efforts dans un premier temps sur ce qui a un réel impact environnemental plutôt que de partir de suppositions.
En tant qu’ éco-ambassadeurs, nous pouvons ainsi commencer à faire des propositions dans ce sens à la lumière de cette étude de GreenIT.fr sur l’impact du numérique en France, en nous intéressant par exemple à un acteur de l’électronique responsable comme Commown.
Dans un article ultérieur, nous aborderons les questions de contribution à la neutralité carbone mondiale, et aux processus collaboratifs que l’on souhaite mettre en œuvre pour décider de que l’on fait de ce bilan. En attendant nous vous invitons à prendre connaissance de la Net Zero Initiative de Carbone 4 qui donne une définition claire des enjeux et un cadre actionnable de transformation d’entreprise.
Clarification d’expressions employées
Au cours de la finalisation de l’article je me suis aperçu que je faisais la confusion entre certains termes, ce paragraphe va me permettre d’y voir plus clair, en espérant vous aider par la même occasion. Vous constaterez ainsi, si vous avez lu l’article jusqu’au bout, que son titre est erroné 🙂
Empreinte écologique
L’empreinte écologique ou environnementale d’une population est la surface de terre et d’eau qui lui est nécessaire pour subvenir de manière durable à ses besoins en terme d’extraction de matière première, de consommation de ressources produites (nourriture, eau), et d’absorption des déchets. Elle s’exprime en “hectares globaux”. Le jour du dépassement est notamment calculé directement à partir de cette valeur.
[ source Wikipedia ]
Émissions de GES par habitant
Les émissions de gaz à effet de serre correspondent au total des émissions recensées sur le territoire ramené au nombre d’habitants. Elles sont en France de 6 tonnes eq. C02 par an et par habitant.
Empreinte carbone par habitant
L’empreinte carbone par habitant, c’est la même chose en incluant les importations et excluant les exportations. Elle correspond donc mieux à l’impact réel de ses propres habitants sur le climat.
En France, elle vaut 12 tonnes eq. C02 par an par habitant.
[ source https://www.gouvernement.fr/indicateur-empreinte-carbone ]
bilan carbone
Le “bilan carbone” (en minuscules) est une méthode de comptabilité des émissions directes et indirectes des gaz à effet de serre d’une organisation.
[ source Wikipedia ]
Bilan Carbone
“Bilan Carbone” (avec des majuscules) est une marque déposée appartenant à l’association bilan carbone, qui met à disposition des outils, formations, certifications pour effectuer une comptabilité carbone. C’est la méthode de comptabilité la plus utilisée en France.
Félicitations pour la démarche et le compte-rendu !
Une question, quel est le périmètre de ce bilan carbone (scope 1 ? scope 2 ?)
Bonsoir et merci de votre commentaire.
Si j’en crois ce graphique on est sur du scope 1, 2 et 3. https://fr.wikipedia.org/wiki/Bilan_carbone#/media/Fichier:Bilan_carbone_-_scope_p%C3%A9rim%C3%A8tres_-_entreprise.png
Merci. Pour le scope 3, il faut également inclure les émissions liées à l’utilisation des produits/services vendus chez chaque client. Je ne pense pas que ce soit le cas ici (et c’est compréhensible vu la quantité de travail que cela demanderait).
Tout à fait, d’autant plus difficile lorsqu’on vend du service.
Toutefois le premier poste (immobilisations) est lié au scope 3.
Ping : La presse écrite, quelle aventure ! KAIZEN x Zenika – Blog Zenika
Merci pour cet article hyper complet ! J’adore ce format, continuez comme ça 🙂
Ping : Transition éco-responsable de Zenika : test d’un ordinateur portable éco-conçu par Why! – Blog Zenika